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23 novembre 2010 2 23 /11 /novembre /2010 11:18

Quel avenir pour le travail social ?

                 La professionnalisation s’est faite dans les années 70 autour d’un noyau dur : assistantes sociales, éducateurs, animateurs. Avec les mutations socio-économiques qui se sont produites, de nouvelles formes d’interventions sociales apparaissent. Qu’ont fait, que veulent faire et que sont capables de faire les professions labellisées face à cette redistribution des cartes ?

 

Quel bilan faites-vous du travail social en cette fin de siècle ? Le type de référentiels métiers en usage a-t-il encore son utilité ?

           Selon les sociologues, Jean Noël Chopart (chargé de mission à la MIRE (Mission et Recherche, ministère de la Solidarité), François Aballéa (professeur à l’université de Rouen) et Michel Autès (chargé de recherche au CNRS IFRESI / Lille)

François Aballéa :

           Le travail social me paraît avoir globalement réussi son aggiornamento. Il s’est adapté, non sans douleur parfois, au contexte nouveau né de la décentralisation d’un côté, des effets de la crise d’un autre, de la transformation des modes d’intervention de la puissance publique enfin. II s’agit là, en effet, de trois modifications majeures dont l’impact n’a pas toujours été clairement évalué, au moins au début.

Depuis la décentralisation surtout, deux cultures s’affrontent, celle du politique qui s’appuie sur l’écoute et l’intercession et celle du technicien qui met en œuvre des outils de diagnostic, d’analyse et de médiation éprouvés. La crise a recomposé le champ du social, faisant entrer dans la question sociale de nouveaux domaines et donc de nouveaux acteurs : le logement, l’école, les transports publics, l’économique. Elle a modifié les caractéristiques du public, mettant au cœur des difficultés d’insertion la dimension économique, les problèmes de désocialisation grave qui en résultent parfois encore renforcés par la déstructuration, dans un certain nombre de cas, des solidarités familiales et de proximité. Quant à la modification des modes d’intervention, elle s’inscrit dans des logiques managériales s’inspirant des modes de gestion des entreprises et des modes de régulation du marché : appel d’offres, projets, contractualisation, évaluation. Elle manifeste aussi clairement le poids grandissant des logiques institutionnelles, la définition d’objectifs ou d’approches et de méthodologies propres à l’organisation qui emploie ou salarie, au détriment de ce que l’on appelle parfois les logiques professionnelles.

Malgré toutes ces transformations, le travail social reste très présent sur ses domaines traditionnels d’intervention - le diagnostic, le conseil, l’aide, l’assistance et l’accompagnement, même s’il a tendance, en raison de la stagnation ou de l’évolution très modeste de ses effectifs depuis le début des années 80, à se situer davantage dans un rôle d’expert, à être moins présent sur l’accueil et à s’inscrire dans une division du travail qui tend de plus en plus à segmenter l’intervention sociale entre l’accueil, le diagnostic, une proposition de réponse, un suivi ou un accompagnement, voire une évaluation.

Jean-Noël Chopart :

            Pour se prononcer, il s’agit surtout de comprendre les enjeux actuels du travail social et pour cela, il est nécessaire de le resituer dans son contexte. Dans la deuxième moitié du XXe siècle le travail social a connu deux grandes périodes majeures :

• Autour des années 1970, le travail social a vécu une phase d’institutionnalisation et de stabilisation grâce à des politiques sociales volontaristes, bien symbolisées par la loi de 1975 ou les textes concernant les circonscriptions d’action sociale. Mais le champ du travail social n’a pas l’unité qu’on veut bien rétrospectivement lui prêter aujourd’hui. L’augmentation conséquente des effectifs de cette époque s’accompagne d’une structuration progressive d’un conglomérat de « quasi professions » relativement étanches les unes aux autres et dépendant pour l’essentiel du label étatique que constituent les diplômes d’État, les procédures d’agrément, la définition des cadres d’emploi public (fonction publique d’État et fonction publique hospitalière) et surtout la validation des conventions collectives du secteur privé non-lucratif qui spécifient les rôles et la division technique du travail social.

La logique de professionnalisation s’effectue à partir de ce que certains ont nommé « un noyau dur » de quatre professions de niveau III, les assistantes sociales, les éducateurs, les animateurs et les conseillères. Les autres catégories de travailleurs sociaux tentant de se structurer à l’image de ces quatre professions canoniques.

Les travailleurs sociaux appartiennent aux professions intermédiaires et ne disposent donc pas de toutes les marges de manœuvres « des vraies professions », tels les médecins ou avocats. Les corpus théoriques sur lesquels ils s’appuient sont produits par d’autres (universitaires, médecins, psychiatres, magistrats) et leur représentation auprès des cénacles de décision est également bien souvent réalisée par d’autres (personnalités des œuvres philanthropiques, administrateurs d’associations, élus, hauts fonctionnaires, etc.). Après 1968, une phase active de syndicalisation a pu paraître changer la donne, et permettre en particulier une réflexion interne sur les positionnements au regard des fonctions de « contrôle social », mais elle s’est rapidement épuisée et n’a pas permis de constituer le travail social comme une entité bien dessinée. Cependant, cette position « intermédiaire » était globalement acceptable et acceptée. Car elle reposait sur une large délégation et donc, sur une grande autonomie des travailleurs sociaux quant aux gestes techniques du quotidien. Le travail social était fondé sur une culture de la dérogation, de l’auto-saisine et de la médiation entre usagers et institutions sociales. Cette autonomie était d’autant plus acceptable que les populations qu’il s’agissait de soutenir étaient moins nombreuses et plutôt marginales en raison de déficits personnels ou de déficit d’intégration dans une société de croissance.

• Dans les années 1980 et 1990 le travail social a connu une seconde phase dans laquelle sont intervenues de profondes mutations sociales et économiques. Le travail social ne s’est jamais si bien porté tant il est vrai que la crise a fait soudainement gonfler les cohortes de populations en difficulté et que les besoins en matière d’intervention sociale n’ont jamais été aussi importants. Mais de nouvelles formes d’intervention sociale paraissent se substituer aux anciennes provoquant un profond malaise identitaire dans les rangs des travailleurs sociaux.

La régulation professionnelle passe d’une logique de la qualification à une logique de la compétence individualisée qui affaiblit le poids des certifications initiales et permet à toute une série d’outsiders de postuler à des emplois sociaux. Le social est de moins en moins une « spécialité ». En effet, tous les secteurs de notre société doivent faire face à l’exclusion : les administrations, la Sécurité sociale, l’hôpital, l’école, le logement, la grande distribution, l’entreprise. L’intervention sociale n’est plus, aujourd’hui, tout à fait l’apanage d’un corps de spécialistes labellisés et identifiés comme tels, mais devient la préoccupation de tous, bénévoles, gens des guichets, agents des services publics, etc.

Michel Autès :

        En fait, il ne faudrait pas poser à nous, sociologues, des questions sur ce qu’est le travail social, ce qu’il risque de lui arriver, comment il se recompose etc.

Parce que nous sommes tentés d’y répondre. Or je prétends que ces questions ont un sens si on accepte qu’elles n’aient pas de réponses, si l’on veut que les fonctions que le travail social remplit, et la manière, somme toute laïque, selon laquelle il les remplit, perdurent. Car si quelqu’un a des réponses à des questions comme : qu’est-ce qu’un homme ? Ou qu’est-ce qu’un sujet ? Comment ne pas voir que celui-là se pose dans une position démiurgique de toute-puissance.

Cela ne veut pas dire qu’on ne peut rien dire du travail social, ni, encore moins, qu’il ne faut pas s’intéresser à ses fonctions instrumentales, et j’insiste ici tout particulièrement sur ce point, sans lequel mon propos serait absolument scandaleux : il faut répondre aux besoins, il faut satisfaire les besoins.

Mais il faut accepter que le travail social commence à partir de là. Il faut par conséquent accepter que le travail social soit avant tout un ensemble de pratiques collectives dont la tâche essentielle est de produire des sujets et donc des acteurs sociaux. Mais il faut savoir aussi que ces pratiques ne peuvent s’installer en dehors d’une relation clinique avec les sujets en demande.

Conclusion

   Au regard de toutes ces interventions, il incombe à nous, acteurs ou futurs acteurs du domaine social de porter des réflexions nobles sur l’avenir du travail social au Bénin.

Cet état de chose ne serait possible sans l’implication active et la volonté manifeste de l’Etat.

Le social aura son statut original, dès que chaque acteur laissera de côté la poursuite des intérêts personnels au détriment du bien être social des individus, des familles, des communautés défavorisés ; bref de toute la couche vulnérable de notre pays le Bénin.

 

                                                                                                                                                                   Pour ESAS BENIN

                                                                                E. Odilon HOUNTON

 

 

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commentaires

F
<br /> <br /> serait-ce possible d'imagine un monde prospère, développé et plein d'initiatives concluantes sans le service social? je crois que non et l'essentiel de la question reste et demeure la promotion<br /> de ce secteur extrêmement important dans notre pays. Nuance: le Service Social dont je parle ici n'est pas le Travail Social au sens ordinaire mais du professionnalisme avéré et certifé. Ces<br /> professionnels sont formés au Bénin à l'Ecole Supérieure des Assistants Sociaux. Ils détiennent la clef du social et fonctionnent avec elle. Il vaut mieux le reconnaître et en prendre<br /> conscince.....<br /> <br /> <br />                                                                   <br /> Franck D. B.<br /> <br /> <br /> <br />
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E
<br /> <br /> merci bcp Franc pour ta noble participation.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> j'aime le social<br /> <br /> <br />
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